Immobilier: le secteur se braque contre un courtier digital

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Agence immobilière low cost qui connecte acheteurs et vendeurs, Neho publiait sur son site les annonces de ses concurrents. Menacée de poursuites pénales, elle a fait marche arrière.

Entre Neho et les courtiers traditionnels, c’est la guerre des commissions et des annonces immobilières.

Entre Neho et les courtiers traditionnels, c’est la guerre des commissions et des annonces immobilières.

afp

«La violation de nos droits de propriété intellectuelle expose votre société à des conséquences juridiques graves, y compris des dommages et intérêts.» C’est sur ce ton musclé que plusieurs régies et courtiers ont admonesté Neho. La start-up numérique low cost s’est attiré les foudres des professionnels de l’immobilier depuis qu’elle a décidé de publier sur son site internet les annonces de ses concurrents.

«En reprenant les annonces de biens à vendre sans l’accord des ayants droit, Neho donne aux visiteurs une impression d’importance de biens mis en vente qu’elle n’a pas et augmente sa base de données, ce qui pourrait s’avérer illicite», a réagi Frédéric Dovat, au nom de l’Union suisse des professionnels de l’immobilier.

Plainte d’un concurrent

«Après avoir misé sur le digital, Neho se rend compte des limites du numérique. Le métier de courtier doit être réglementé», recommande Bart Scholliers, président de l’Association des agences et courtiers immobiliers genevois. «La lettre de mon avocat vient de partir. J’ai déposé une plainte», a déclaré Alain Chesaux, administrateur de Glauser Immobilier SA, dont les annonces ont été publiées par Neho. «Avec leur visite virtuelle, ces gens non connectés au réel ne se contentent pas de tuer notre métier, dont la base est le vrai contact. Maintenant, ils volent le fruit de notre travail», pourfend un courtier.

Neho a retiré de son site les annonces de ses concurrents mais se contente de préciser qu’elles ne sont plus en ligne.

Neho a retiré de son site les annonces de ses concurrents mais se contente de préciser qu’elles ne sont plus en ligne.

Capture d'écran

«Nous avons reçu des réactions abondantes et disproportionnées par rapport à une pratique que bien d’autres font sans aucun problème. Neho n'est pas un courtier digital. Nous avons plus d'une vingtaine de courtiers qui font le même travail que n'importe quel autre courtier immobilier. La seule différence est que nous avons développé de nombreux outils back office qui leur permettent d'être plus efficaces», a réagi Florent Bourachot, patron de Neho. Face à la levée de boucliers, la start-up a brandi le drapeau blanc: «Nous avons retiré les annonces litigieuses.»

Tarifs différents

Dans un monde qui ne cesse de s’«ubériser», l’arrivée de Neho sur le marché immobilier est une suite logique. Là où les agences traditionnelles prélèvent 3 à 5% de commission après une vente, Neho raille «une pratique archaïque» et propose un forfait fixe au propriétaire. Pour chaque vente, la différence entre les concurrents peut aller du simple au triple. «Neho, c’est comme une voiture neuve à laquelle il faut ajouter des options. Le tarif initial n’est pas le tarif final. Le moins cher coûte cher», analyse un observateur du marché immobilier. Cette concurrence a lieu dans un contexte tendu. «La hausse des taux d’intérêt a entraîné un net recul de la demande de logements en propriété. Le récent envol des prix fait de plus en sorte que la part des ménages pouvant se permettre d’accéder à la propriété a encore diminué», observait une étude en mars dernier.

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